Les récents évènements de Tunisie et Égypte ont mis en évidence l'hypocrisie de certains pays occidentaux à l’égard des régimes autoritaires de la région. Ces régimes ont été longuement protégés et parfois instaurés par les puissances occidentales. Maintenant que ces leader autoritaires sont renversés ou en voie de l’être, il est de bon ton de les appeler des « tyrans » et de célébrer le génie des peuples épris de démocratie. Lorsqu’on souligne le retournement de veste, on se voit régulièrement dire « Certes ils étaient autoritaires, mais c’était la seule alternative face aux extrémistes musulmans. »

Je voudrais proposer un point de vue plus large et un brin machiavélique. Demandons-nous à qui profite cette situation de « dictature amie » ?

  • Au dictateur lui-même bien sûr, et son cercle d’amis au sommet du pouvoir.
  • Aux pays occidentaux soutenant le régime, car ils ont maintenant les faveurs de ce régime corruptible qui autorise généreusement leurs entreprises à venir exploiter les ressources nationales (pétrole, minerais, bois, etc.). L’histoire montre que les dictateurs hésitent rarement à brader leurs richesses nationales pour recevoir en échanges protection et pots-de-vin.
  • Aux extrémistes enfin, qui se retrouvent participants actifs de cette arnaque, souvent à leur insu. En effet ils sont bienvenus pour faire quelques attentats de temps en temps, et on leur garanti la meilleure couverture médiatique, car le spectre de leur menace est indispensable pour justifier et maintenir la situation. On parle d’eux et de leurs projets.

Un scénario assez naturel est comme suit:
1. Le pays développé "A" louche sur les ressources d'un pays du Tiers monde "B", mais ne peut pas le coloniser car ce n'est plus une pratique tolérable.
2. A met en place un régime autoritaire en B qui est redevable, voire même dépendant de l'aide de A.
3. A envoie ses entreprises se servir chez B.
4. A confectionne une menace pour justifier l'utilité du régime dictatorial B.

Ces extrémistes ne sont pas forcément des fondamentalistes religieux, mais peuvent aussi bien être des séparatistes belliqueux ou des rebelles. Leur menace justifie l’instauration des mesures autoritaires, notamment à des instantes clefs de la vie politique. On entend souvent dire à ce sujet « Les extrémistes ont organisé une séries d’attaque à l’approche des élections pour tenter de perturber le processus démocratique, mais heureusement le gouvernement a pris des mesures spéciale pour assurer le retour à l’ordre et la bonne marche des votes. » (Vers la bonne urne, ndlr)

Parfois enfin la menace extrémiste peut être vague, diffuse et extérieure. On entend alors « Certes ce régime est imparfait, mais il mérite d'être soutenu car c'est un facteur de stabilité pour la région. »

Il y a aussi un triple perdant, le peuple du pays :

  • Il se retrouve emprisonné dans une société dictatoriale et arbitraire.
  • Les ressources de son pays sont pillées par les compagnies des pays occidentaux complices.
  • Ils sont victimes du terrorisme et de la radicalisation organisée pour entretenir l’extrémisme.

De nombreux pays correspondent plus ou moins à ce profil, souvent autour du pétrole : Gabon, Turkménistan, Afghanistan, Arabie Saoudite, etc.
Pendant la guerre froide, le seule fait de ne pas être communiste a permis à des régimes dictatoriaux d'Amérique Latine de recevoir le soutient des États Unis.